Reconstruction faciale : du « sur-mesure » grâce aux nouvelles technologies d’impression 3D

Reconstruction faciale : du « sur-mesure » grâce aux nouvelles technologies d’impression 3D

La reconstruction d’un visage défiguré, par un traumatisme ou un cancer, est devenue une prouesse technologique grâce aux technologies 3D, de la planification pré-opératoire jusqu’à l’impression de structures en titane adaptées sur mesure à l’architecture osseuse. Une spécificité du service de Chirurgie Plastique, Reconstructrice et Esthétique de l’hôpital Tenon, dirigé par le Dr Michaël Atlan, (Hôpitaux universitaires Est Parisien, HUEP-Sorbonne Médecine Université).  

L’impression en trois dimensions a gagné le domaine de la médecine et de la chirurgie. Depuis 2015, le Dr Quentin Qassemyar, ancien chirurgien plastique de l’Institut Gustave Roussy, aujourd’hui à Tenon, l’utilise régulièrement. Ce chirurgien spécialisé en chirurgie réparatrice et esthétique de la face ainsi qu’en microchirurgie, s’est associé avec une société spécialisée afin de concevoir de fines structures anatomiques sur-mesure en trois dimensions et ainsi reconstruire un visage au plus près de la morphologie initiale et des souhaits esthétiques de la personne.

La modélisation 3 D de la future reconstruction faciale (mandibule, maxillaire orbite…) pour la tête et le cou, donne un aperçu du résultat postopératoire pour le patient, mais permet aussi une planification pré-opératoire optimisée pour précision augmentée du geste chirurgical. Auparavant, cette planification reposait sur des techniques plus artisanales et l’expérience du chirurgien.

L’os le plus utilisé dans la reconstruction est le péroné – os rectiligne – qu’il faut couper très précisément pour reproduire l’anatomie précise et subtile de la mandibule ; toute erreur ayant des conséquences fonctionnelles et esthétiques considérables. Aujourd’hui, grâce à ces technologies de planification très fines, le chirurgien est guidé dans son geste grâce à des guides de coupe sur-mesure, s’insérant sur l’os et qui spécifient l’angle exact de coupe osseuse pour la meilleure reconstitution de l’anatomie. C’est à la fois un gain de temps et de précision anatomique, offrant la possibilité de fixer des implants dans le même temps opératoire. Cela est habituellement réalisé à distance pour corriger justement les défauts de conformation dus à l’ancienne technique.

Par ailleurs, la fabrication de prothèses remplaçant très précisément des parties et des structures osseuses du visage du patient « sur-mesure » (nez, mandibule, voûte crânienne, portions de mandibules avec implants dentaires incorporés), à l’aide de biomatériaux dérivés du titane poreux* est aussi rendue possible.

Toutes sont des technologies de pointe proposées à l’hôpital Tenon, indissociables d’une expertise en microchirurgie. Certaines sont inédites à l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (APHP) et même au niveau mondial. « Imprimer en 3D, du titane microporeux, biomatériel de grande qualité, en remplacement de parties osseuses manquantes peut concurrencer la technique conventionnelle de la conformation d’un morceau de péroné prélevé chez le patient qui reste une opération lourde, souligne le Dr Qassemyar. La technologie 3D, déjà pratiquée sur une trentaine de patients, réduit considérablement les séquelles chirurgicales, le temps de convalescence, le nombre et la durée des hospitalisations (cinq jours pour reconstruire une mandibule), pour un coût de la prothèse aux alentours de 4 000 euros ».

Aujourd’hui, les enfants, les patients jeunes, sans antécédents tabagique ou alcoolique sont opérés préférentiellement grâce à la 3D, ainsi que les personnes en échec de reconstruction par la technique classique autologue. Dans un avenir proche, l’objectif est de subsister au titane des biomatériaux similaires à la composition osseuse.

De l’imagerie 3D au projet artistique

Soigner les personnes défigurées ne fait pas uniquement appel à la 3D. C’est aussi un accompagnement psychologique particulier et difficile. Le Dr Qassemyar suit de nombreux patients vivant avec une défiguration liée au cancer de la face et des voies aérodigestives supérieures. Idée originale et délicate, il a décidé de collaborer avec le photographe Matthieu Farcy pour suivre chaque étape de leur transformation et montrer leur cheminement dans la reconstruction et la perception de leur visage, leur réintégration dans leur vie sociale. « Ce projet artistique s’appelle Méduse, car la malformation faciale fige le regard et le comportement des autres, explique Quentin Qassemyar. L’autre volet du projet est de placer à leur tour les patients derrière l’objectif, afin qu’ils racontent leur quotidien en images, ce qui les touche, ce qui révèle l’impact de la défiguration dans leur vie et environnement. Ceci pour dépasser l’aspect physique et ainsi les connaître avant même de découvrir leur visage ».

Le projet Méduse sera exposé dans les locaux de l’APHP.